Pour beaucoup, l’automne est la saison où les jours raccourcissent, où les températures s’effondrent et où la météo tourne au maussade. Mais pour les photographes, c’est aussi le temps des paysages flamboyants. Les feuilles caduques prennent différentes nuances de jaune et de rouge avant de tomber. De plus, le soleil rasant fait ressortir ces tons chauds. Et pour peu que vous trouviez un ciel dégagé et quelques arbres à feuilles persistantes, vous aurez toute la palette de l’arc-en-ciel sur le même cliché.

Le buisson ardent

Voici peut-être le sujet incontournable de l’automne : l’arbre flamboyant, de préférence isolé. L’érable rouge est le sujet idéal. Absent d’Europe à l’état naturel, il a souvent été importé dans un but décoratif. De nombreuses variétés de sumacs sont également cultivées dans ce but. Elles se distinguent par un feuillage violet qui tourne au rouge ou à l’orange en octobre. Vous trouverez facilement ces essences dans les massifs de verdure urbains.

Buisson rouge au milieu du vert et du bleu
La forêt verte et le ciel bleu font ressortir le rouge de l’arbuste isolé. © Franck Mée

Notez que si les tons chauds dominent l’image, les couleurs de votre « buisson ardent » paraîtront moins spectaculaires. Préférez donc un spécimen entouré de teintes froides. Il peut se trouver en sommet de colline et se détacher sur un ciel bleu, ou bien il s’agira du seul érable dans un bois de conifères d’un vert sombre. Profitez de la lumière du milieu d’après-midi, qui fait ressortir toutes les teintes. Équilibrez la balance des blancs (à la prise de vue ou au développement) et poussez la saturation de l’ensemble. C’est le contraste entre les verts-bleus de l’environnement et l’orange-rouge de votre sujet qui le mettra en valeur.

Que la lumière (du soir) soit !

Si un arbre isolé est spectaculaire, une image emplie de végétation dorée est plus évocatrice encore. Il s’agit alors d’une ambiance d’ensemble. Par exemple, gravissez les collines pour trouver un point de vue général sur paysage forestier qui regroupe des essences variées. Au bon moment, certains arbres auront presque perdu leurs feuilles, d’autres quitteront juste leur verdure estivale. Vous aurez alors toute une variété de teintes, du marron encore mêlé de vert des chênes à l’orange lumineux des érables champêtres en passant par le vert immuable des pins ou les variations orange-rouge de certains fayards.

Forêt d'automne par Pascal Bernardon
Une forêt mixte, mêlant feuillus et résineux, peut offrir toutes les teintes de l’arc-en-ciel. © Pascal Bernardon / Unsplash

Ici, la lumière de midi jouerait contre vous. Mais l’automne n’est pas que la saison des feuilles rougeoyantes : c’est aussi celle où le soleil est rasant une bonne partie de l’après-midi. Il donne alors une lumière chaleureuse, jusqu’à la fameuse « heure dorée » qui précède immédiatement son coucher. Cet éclairage est parfait pour faire ressortir toutes les nuances d’ocre.

Vigne à l'automne
Outre les feuilles, certains fruits, comme ces raisins, évoquent immédiatement l’automne. © Franck Mée

Pour ce qui est du rendu, vous pouvez évidemment pousser la saturation. Vous créerez un cliché flamboyant, à l’orangé presque monochrome. Mais vous pouvez aussi jouer la carte de la subtilité. Des réglages moyens distingueront mieux les différentes nuances du feuillage et offriront une ambiance plus naturelle, paisible et vaguement nostalgique.

Les feuilles mortes

Jusqu’ici, nous avons surtout parlé de paysage. Mais la photographie automnale ne se limite pas à ce type d’images. La chute des feuilles est aussi un élément essentiel de l’ambiance saisonnière. Vous pouvez en profiter pour traiter ces débris en gros plan, voire en macro.

Macro de feuille rongée par l'automne
Les feuilles translucides peuvent révéler des motifs spectaculaires à contre-jour. © Franck Mée

Comme pour le buisson ardent, une feuille de couleur vive entourée d’humus noir ou de béton terne (selon que vous vivez à la campagne ou en ville) peut ressortir spectaculairement. Vous pouvez aussi photographier une feuille morte à contre-jour pour saisir par transparence ses teintes, ses nervures et sa texture.

Feuilles en gros plan en sous-bois par June O
Associer gros plan et environnement renforce l’ambiance de l’image. © June O / Unsplash

Pensez aussi à combiner les feuilles mortes au sol et leurs cousines encore accrochées. C’est l’occasion de sortir ce fameux grand-angle macro qui sert si peu. Rendez-vous en sous-bois, faites le point sur une feuille chue et étendez la profondeur de champ pour révéler le fond. Vous obtiendrez une image quasiment monochrome, toute en tons chauds nostalgiques. Ici encore, évitez un rendu trop « claquant » : la délicatesse est de mise.

Dans le brouillard

Lorsque vous dites « couleurs d’automne », la plupart des gens pensent immédiatement à la végétation orangée. Mais un autre phénomène est typique de cette saison : les brumes et brouillards matinaux. L’air étant humide la condensation apparaît au moindre refroidissement – surface d’un lac, nuit dégagée…

Biche et faon dans la brume d'automne
Un affût au petit jour peut vous permettre de saisir de nombreux animaux dans la brume automnale. © John Royle / Unsplash

Mettez le réveil pour en profiter. Les derniers jours avant le changement d’heure, fin octobre, sont idéaux : c’est la période de l’automne où vous vous lèverez le plus tôt par rapport au soleil. Habillez-vous chaudement et rendez-vous au bord d’un lac ou d’un cours d’eau. Au contraire des sections précédentes, vous voudrez sans doute ici faire ressortir les tons froids. Adaptez la balance des blancs pour que la brume ne soit pas tout à fait neutre, mais légèrement bleutée. L’ambiance sera particulièrement réussie si vous avez quelques arbres jaunâtres ou, mieux encore, un animal sauvage qui accrochera le regard.

Petite astuce personnelle : la météo généraliste ignore souvent les brumes matinales, mais la météo aéronautique les indique. Le soir venu, consultez les prévisions (messages TAF, ici par exemple) des aérodromes proches de chez vous, et cherchez les codes « FG » (brouillard) et « BR » (brume).

La couleur d’automne ne suffit pas

Voici sans doute le conseil le plus important. Bien entendu, vous voulez photographier les couleurs d’automne ; mais elles ne suffisent pas. L’érable le plus rouge, la futaie la plus colorée, la brume la plus bleue sur la prairie la plus jaune ne font pas une photo.

Frelon sur feuilles d'automne
Le soleil rasant et les feuilles mortes renforcent les couleurs des insectes pour leurs dernières sorties avant l’hiver. © Franck Mée

Trouvez un sujet et composez l’image, comme n’importe quelle autre photo. Cherchez le meilleur angle en étudiant les volumes, les ombres et les textures. Profitez des reflets et des transparences des étendues d’eau et des immeubles. Attendez que quelque chose se passe, qu’un chevreuil vienne boire, qu’un couple de promeneurs apporte une touche d’humanité. Utilisez les couleurs d’automne, non comme sujet, mais comme cadre.

L’automne: un environnement plutôt qu’un sujet ?

Jacques Prévert et Daniel Balavoine partageaient ce constat : l’automne n’est pas un sujet en soi, mais plutôt un excellent cadre pour évoquer divers sentiments. Face à une scène de saison, aussi colorée soit-elle, prenez une seconde pour vous demander de quoi vous voulez parler. La réponse peut être aussi simple que « je veux dire que j’ai trouvé cette scène sublime » : cela vous aidera déjà à orienter votre composition, votre prise de vue et votre développement afin d’obtenir un cliché intéressant.

Dans tous les cas, que les couleurs d’automne soient votre sujet essentiel ou l’environnement qui renforcera un autre cliché, ne laissez pas la météo vacillante vous dissuader. Sortez et profitez de ces teintes uniques !

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Auteur

Traducteur, journaliste, pilote privé. Passionné de photo et de cinéma, docteur en binge-watching, mais surtout fasciné par tout ce qui vole, du martinet au Boeing 747. Considère qu'un 200 mm, c'est un grand-angle.

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