Impossible de parler photographie sans aborder le sujet du bokeh. Sur n’importe quel site, forum, livre sur la photographie, on cherche à reproduire un beau bokeh. Vous savez, ce fameux arrière-plan flou sur les photos qui donne un cachet artistique et professionnel à vos photos. Nous allons voir ici comment le provoquer, mais surtout comprendre comment il se forme.

Définition

Le bokeh, terme qui vient du japonais Boke (ボケ) qui signifie “flou” ou “brume”, peut se définir comme “l’effet d’arrière-plan défocalisé artistique que vous obtenez lorsque vous photographiez un sujet avec un objectif lumineux à la plus grande ouverture”. En d’autres termes, c’est la qualité esthétique du flou des éléments présents en dehors de la zone de netteté sur une photographie prise avec une faible profondeur de champ.

De nombreux paramètres jouent sur la formation du bokeh, que ça soit la qualité optique de votre objectif, sa focale, la taille du capteur ou la profondeur de champ. Ce sont des éléments déterminants qui peuvent définir la forme et la taille que prendra votre bokeh. Avant de voir leur incidence particulière, parce que c’est l’élément central de la compréhension du bokeh, il semble important de faire un rapide rappel sur la profondeur de champ.

Bokeh : portrait.
Photo : BUNDITINAY / Shutterstock.

Rappel sur la profondeur de champ

La profondeur de champ (PdC) est un élément déterminant en ce qui concerne l’apparition du Bokeh, étant donné que celui-ci se définit comme la forme que prennent les éléments lorsqu’ils ne sont pas dans la zone de netteté de la photo. Cette zone de netteté, ou plan focal, est déterminé par l’ouverture du diaphragme de l’objectif et peut être découpé en 3 plans : le premier plan, le plan focal et l’arrière-plan. Tout ce qui se trouve dans le plan focal sera net alors qu’au contraire, tout ce qui se trouve à l’avant et l’arrière-plan sera flou.

Les limites de ces zones ne sont pas clairement définies et varient selon différents paramètres, à commencer par l’ouverture. Plus le diaphragme est fermé, grand chiffre, plus le plan focal est grand, plus le diaphragme est ouvert, petit chiffre, plus la zone de netteté est faible.

Pour créer un effet de bokeh, le but est de placer un sujet dans le plan focal pour qu’il soit net ainsi qu’un élément dans l’arrière-plan qui lui sera flou. Mais au-delà de ça, il faut noter que le flou d’arrière-plan, ou bokeh, est de plus en plus important au fur et à mesure qu’il s’éloigne de la zone de netteté.

Pour créer un bel effet de bokeh, vous allez donc devoir apprendre à composer et surtout décomposer vos photos en différents plans et gérer leur distance en fonctions de différents paramètres qui ont tous une incidence sur la profondeur de champ.

Bokeh : guirlande.
Photo : Androshchuk Yuliia / Shutterstock.

Les différents paramètres du bokeh

Le diaphragme : Pour obtenir un bokeh doux, moelleux, rugueux, nerveux, il ne suffit pas que l’arrière-plan soit distancé du plan focal afin de le rendre flou. Quand on parle de bokeh, on ne se limite pas à la recherche du flou, on recherche une apparence esthétique du flou, quelque chose d’artistique qui fait pleinement partie de la composition de votre photo. Cette apparence, en plus d’être liée à la profondeur de champ et donc à l’ouverture du diaphragme, elle est aussi liée à la composition de ce dernier. En effet, tous les objectifs ne se ressemblent pas et ne sont pas construits de la même manière, si sa formule optique, la qualité des verres ou les différents traitements ont une incidence, certains objectifs peuvent être construits avec des diaphragmes à 6 lamelles, quand d’autres en ont, 7, 9, 11, même 15 lamelles. De leur nombre et de la courbure des lamelles dépend alors la forme du bokeh, de son aspect plus ou moins circulaire, de la netteté de son contour, de sa densité.

Bokeh : portrait.
Photo : Piupiupics / Shutterstock.
  • La focale : Vous le savez déjà sûrement mais, pour une même scène composée de manière identique, à une même ouverture, plus la focale est importante, plus la profondeur de champ est faible et donc la transition du net vers le flou plus ou moins courte.
    Par exemple, pour un sujet que vous voulez photographier à une ouverture de f/5.6, à cadrage identique, la profondeur de champ variera en fonction de la focale utilisée : 3,46 cm de PdC au 50 mm (MaP 53 cm) et 1,28 cm de PdC au 300 mm (MaP 200 cm). Cet exemple est variable en fonction d’autres paramètres, mais vous prouve que, par exemple, si vous cadrez votre sujet au grand-angle, pensant bien faire parce que vous êtes au plus près de votre sujet donc idéal pour en faire un gros plan, en réalité, le passage du net au flou est beaucoup plus lent et donc l’arrière-plan beaucoup trop présent, contrairement à l’utilisation d’une longue focale, quitte à vous éloigner considérablement du sujet.
Bokeh : papillon.
Photo : volodimir bazyuk / Shutterstock.
  • La mise au point : Vous vous dites sûrement dans ce cas, “Pourquoi investir dans un 50mm macro f/2.8, si on peut le faire avec un 300 f/5.6 à 2m du sujet ?”. Tout simplement parce qu’a contrario, le flou s’étend à mesure qu’il s’éloigne du plan de mise au point, lorsque la distance entre le sujet et l’arrière-plan est largement supérieure à la distance entre l’appareil photo et le sujet, le flou se fait de plus en plus présent voir totalement uniforme. Imaginons que vous souhaitiez prendre une fleur en photo, mais derrière cette fleur il y a encore de la végétation à environ 50cm d’elle. Pour reprendre l’exemple précédent, vous pouvez prendre la photo avec un 300mm ouvert à f/5.6 en vous situant à 2m de la fleur, soit 200cm et avoir 1,28cm de profondeur de champ. Si vous souhaitez prendre la même photo avec un 50mm macro ouvert à f/5.6, mais cette fois en étant situé à une distance de 30cm du sujet, la profondeur de champ sera quasi similaire, soit 1,02cm. Pour autant le bokeh sera plus beau avec le 50mm macro, car la distance entre le sujet et l’arrière-plan sera largement supérieure avec le 50mm qu’avec le 300mm. Le ratio avant-plan/sujet – sujet/arrière-plan est de ⅗ avec le 50mm et 20/5 avec le 300mm.
Bokeh : papillons.
Photo : Ivan Asmalouski / Shutterstock.
  • La luminosité : Bien entendu, pour avoir un bokeh il faut des éléments dans le fond, si vous avez juste un mur gris, mis à part lisser ses imperfections ça n’a aucun intérêt. Il faut de la végétation, la perspective d’une rue, des spots lumineux, n’importe quoi qui montre l’éloignement entre le sujet et l’arrière-plan. Mais, mieux que tout, il faut un arrière-plan qui présente un contraste, des teintes et des luminosités pour non seulement se détacher du sujet, mais aussi pour se mêler jusqu’à devenir unies.
Bokeh : jouet.
Photo : PhotoStockPhoto / Shutterstock.
  • La taille du capteur : L’ouverture, la distance de mise au point, la focale, tous sont des éléments importants pour réussir un effet de bokeh, mais s’il est toujours possible de bricoler et de s’en arranger, il y en a un qui limitera votre effet et qui sera difficile à surpasser, c’est la taille du capteur. Plus il est petit, moins le bokeh est doux. C’est pourquoi il est plus difficile d’en obtenir avec un APS-C et encore plus avec un compact ou un smartphone. Ce n’est pas une raison pour le jeter et investir directement dans un plein format non plus, avec ces quelques conseils et l’amélioration en postproduction ou via les applications, le bokeh reste à votre portée.

Conclusion

Que ça soit pour un portrait, des photos de faune ou de flore, de la macro ou juste le plaisir de la recherche de créativité, vous avez tout pour réussir à générer un effet bokeh sur vos prochaines photos. Vous l’aurez compris, il n’y a pas de recette miracle pour y arriver, mais simplement la recherche du meilleur compromis en fonction de la situation face à laquelle vous vous trouvez et le matériel que vous avez à disposition.

Dans tous les cas, gardez en tête de toujours essayer de :

  • Éloigner autant que possible le sujet de l’arrière-plan ;
  • Vous approcher autant que possible du sujet afin de réduire la distance avant-plan/sujet par rapport à celle du sujet/arrière-plan ;
  • Utiliser la plus longue focale possible afin de réduire la profondeur de champ ;
  • Ouvrir le diaphragme au maximum pour une faible profondeur de champ ;
  • Surveillez le contraste entre votre sujet et l’arrière-plan afin de le faire ressortir.

Si vous respectez tous ces conseils, vous ne devriez plus avoir aucun mal à obtenir un bokeh doux, onctueux et harmonieux sur vos prochaines photos.

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Auteur

Photographe, auteur et formateur. Il est un grand spécialiste de l'industrie de l'image. La photo et la vidéo n'ont pas de secret pour lui.

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