Arrêtez de vouloir faire de la macrophotographie ! Il y a des termes photographiques si génériques qu’ils perdent de leur précision. La macrophotographie en est un. Ainsi toutes les images un tant soit peu en gros plan sont estampillées MACRO. Dans la réalité, 9 images sur 10 ne sont pas une vraie macrophotographie. Ce sont en réalité des proxiphotographies. C’est-à-dire des images prises avec un rapport de reproduction sur le capteur numérique inférieur à 1:1. Si ces propos vous semblent confus ou un peu trop techniques, ne vous inquiétez pas. Après quelques explications préalables sur le rapport de grandissement, le reste de cet article concerne le potentiel créatif et artistique de la proxiphotographie.

Explication sur le rapport de grandissement 1:1

Si la macrophotographie et la proxiphotographie appartiennent à la thématique de la photographie rapprochée, ce n’est qu’à partir du rapport 1:1 qu’une image correspond à la définition d’une macrophotographie.

Le facteur de grossissement ou de grandissement est déterminé par la taille du sujet photographié et son rapport de reproduction sur le capteur numérique … ou la pellicule. Le schéma ci-dessous vous explique cette notion.

Pour un rapport de grossissement supérieur à 1:1 et bien au-delà, on parlera de microphotographie et hypermacrophotographie. Pour un grossissement compris entre 1:4 et 1:2, on emploiera le terme de proxiphotographie. Concrètement, cela revient à photographier des petits sujets (animal ou végétal) qui seront reproduits au quart ou à la moitié de leur taille réelle sur le capteur.

Voici une seconde illustration mettant en avant la facteur de grossissement. Prenons l’exemple de la taille d’un capteur plein format (24x36mm). Sur l’image 1 à l’échelle volontairement exagérée, figure la reproduction d’une coccinelle d’une taille de 1,2 cm sur une surface de 24×36 mm avec un rapport 1:1 (soit une macrophotographie). Sur l’image 2, la coccinelle est reproduite avec un rapport 1:4, soit 4 fois plus petite. Le rapport 1:4 et 1:3 est le rapport de grossissement maximal que l’on retrouve sur la plupart des zooms actuels.

Le facteur de grossissement dépend de la focale utilisée, mais aussi de la distance de mise au point. Ces informations sont disponibles sur toutes les fiches produits des objectifs.

D’une manière générale, la très grande majorité des objectifs (focale fixe ou zoom) dits « standards » ont un rapport de grossissement assez faible. Ce rapport de grossissement est suffisant dans la majorité des situations, mais pas pour le photographe nature adepte des petits sujets. Il existe des accessoires optiques tels que le multiplicateur de focale ou les bagues-allonges, pour augmenter ce rapport de reproduction. Cependant, cet article va se concentrer sur les objectifs actuels disponibles pour réaliser, sans ajout, de magnifiques photographies nature. 

Le fabuleux potentiel de la proxiphotographie

Comme on l’a vu au paragraphe précédent, la macro photo impose 2 obligations pour atteindre le fameux rapport 1:1. Celui de disposer obligatoirement d’un objectif macro et de s’approcher très près du sujet. En revanche, la proxiphotographie offre la liberté de s’éloigner un peu plus de son sujet et permet de garder un équipement plus “conventionnel”.

Avec un peu plus d’éloignement, il y a moins de risque de voir déguerpir soudainement son sujet. Mais l’avantage principal réside dans le fait que le sujet est immergé dans son environnement. Voilà une belle illustration d’une proxiphotographie regroupant sujet et environnement. Portez votre attention sur la faible proportion du sujet dans l’image, et pourtant vous l’avez identifié en un quart de seconde !

Le fragile équilibre d’une belle proxiphoto

Au-delà des modèles de composition, tels que le nombre d’or ou la règle des tiers, une belle proxiphotographie doit réunir idéalement 7 éléments : 

  • Une lumière intéressante qui jouera un rôle narratif dans l’image
  • Un joli bokeh (avant plan et arrière-plan)
  • Une harmonie entre le sujet et son support
  • Une cohérence entre le sujet et son environnement proche ( là on est dans l’éthique !)
  • Une obligation de netteté sur la tête du sujet (les yeux c’est encore mieux)
  • La lisibilité de l’image (misez sur le minimalisme)
  • Et enfin votre inspiration 

Voici une image qui regroupe la plupart de ces propos.

Mante religieuse ( mantis religiosa) photographié au milieu de la végétation en fin de journée

La recette presque magique d’une belle proxiphotographie

Pour mettre toutes les chances de votre côté pour réaliser une belle proxiphotographie vous devez … trouver un insecte coopératif, et c’est tout ?.

Trèves de plaisanterie. Voici quelques éléments matériels et environnementaux utiles.

Matériel nécessaire à la proxiphotographie

Concernant le matériel photo, optez pour un appareil photo à objectif interchangeable. Peu importe la taille du capteur (micro 4/3, APS-C ou plein format). Privilégiez une longue focale. Si possible au-dessus de 200mm. Un zoom de type 100-400 ou même 70-200mm avec une ouverture modérée (f/4, f/4,5 ou f/5,6) fait parfaitement l’affaire. Une longue focale permet de tasser les différents plans dans l’image et d’isoler suffisamment le sujet principal par une faible profondeur de champ. La longue focale compense un peu la faiblesse de l’ouverture. 

Je ne vais pas ouvrir ici le débat de l’utilité d’un trépied, mais retenez que plus la focale est longue, plus la vitesse d’obturation doit être élevée pour éviter tout flou de bougé.

Voici quelques zooms qui ont la particularité de posséder un rapport de grossissement raisonnable pour vous ouvrir les portes de la proxiphotographie nature.

L’environnement idéal pour faire de la proxiphotographie

Il n’y a pas véritablement de recette magique, mais si vous avez réuni quelques-uns de ces éléments, votre image aura du potentiel. L’infographie ci-dessous illustre une situation de “shoot” idéal.

  • Un ciel un peu voilé ou une lumière diffuse pour ne pas avoir des contrastes trop marqués
  • Un terrain légèrement en pente pour casser la ligne d’horizon
  • Une zone libre avant et après le sujet : votre sujet sera plus facilement mis en valeur et votre image gagnera en lisibilité
  • Photographier à travers la végétation permet de bénéficier d’un flou d’avant-plan et d’un effet de profondeur
  • Des couleurs de feuillages différentes sont un plus

La composition

En proxiphotographie, le Graal est d’avoir l’opportunité d’immortaliser artistiquement un comportement animal : scène de prédation, accouplement, toilette…) En matière de photo nature, le photographe n’a pas le pouvoir d’agencer les différents éléments de l’image comme il le souhaite. Pour autant, il doit composer son image de la façon la plus harmonieuse possible. Pour cela, la composition selon la règle des tiers est une valeur sûre pour le sujet qui nous intéresse ici.

La composition selon la règle des tiers consiste à décentrer le sujet sur une des ligne de force. Peu importe que cela soit le tiers droit, gauche, bas ou haut. Les intersections des lignes sont  appelées points de force. L’idéal étant de placer un élément fort du modèle sur un point de force, comme son œil par exemple. Comme dans l’image ci-dessus, le regard de l’animal doit avoir de la place devant lui.

Conseils et recommandations complémentaires

Vous progresserez en proxiphotographie par itérations successives. Concrètement, cela signifie qu’il n’y a pas qu’une seule bonne manière de photographier la scène qui se joue devant vous :

  •  N’hésitez pas à vous déplacer et varier les angles de prise de vue tout en étant au niveau du sujet photographié
  • Cherchez des trous de lumière dans l’image
  • Prenez le temps d’observer avant de déclencher
  • Revenez à plusieurs heures de la journée pour apprécier les fluctuations de lumière et l’impact sur votre image
  • Servez-vous des différents éléments naturels sur place (pierre, herbe, feuille, branche) sans dégrader l’environnement
  • Soyez respectueux si vous devez manipuler un animal (et renseignez-vous au préalable sur la dangerosité de cette manipulation)

Quelques images de proxiphotographie artistique accessibles à tous

Rainette méridionale photographiée dans la réserve naturelle du Méjean prés de la maison de la nature à Lattes (34)
Magicienne dentelée (saga pedo) photographiée sous une pinède dans le Sud de la France
Libellule engourdie, photographiée dans le matin d’un mois de novembre dans le Sud de la France
Diablotin (larve d’empuse, empusa pennata) photographié sous une pinède 
Rainette photographiée en contre-jour par temps gris
2 Papillons machaons photographiés légèrement en décalé, dans un champ abandonné au milieu de la garrigue dans le Sud de la France

Pour en savoir plus la proxiphotographie

Il existe à l’heure actuelle de nombreux livres très bien écrits sur la macrophotographie et aucun sur la proxiphotographie et son approche artistique. Pourtant, comme je le mentionnai au début de cet article, la majorité des photographes pratiquent la proxiphotographie. C’est un vrai paradoxe. C’est pour combler cette incohérence que j’ai décidé de partager mon expérience de photographe nature spécialisé en proxiphotographie. J’ai donc écrit et illustré le premier livre entièrement dédié à la pratique de la proxiphotographie. Vous trouverez toutes les informations sur le site art-macrophotographie.fr

Avatar de Patrick Goujon
Auteur

Photographe passionné spécialisé dans la macro et proxi photographie créative. Amoureux de la nature et aussi un peu geek sur le matériel photographique ?.

2 Commentaires

  1. Avatar de Patrick Goujon

    Très belles photos et article intéressant.
    Suggestion : il serait vraiment profitable d’indiquer les principales données EXIF.
    Par avance merci pour les prochains articles
    BP

    • Avatar de Patrick Goujon
      Miss Numerique Répondre

      Bonjour, merci pour votre commentaire et bien noté pour les prochains articles ! Bonne journée

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