Le DNG est un format de fichier conçu par Adobe. Son objectif : remplacer les formats RAW. Pour ses défenseurs, il améliore la compatibilité entre les logiciels, notamment avec les derniers appareils photo. Il est aussi plus durable et donc mieux adapté à l’archivage. Mais il peut être plus compliqué à mettre en œuvre. Alors, devez-vous passer au DNG ?

Un RAW pour les remplacer tous ?

Il est sans doute inutile de vous détailler à nouveau l’intérêt des fichiers RAW. Si leurs avantages ne sont pas clairs, rendez-vous sur notre article dédié au format RAW. En résumé, enregistrer les données brutes du capteur permet de refaire à volonté toute la chaîne de traitement d’image. Vous pouvez donc modifier sur l’ordinateur le dématriçage, la gestion du bruit et de la netteté, la correction des aberrations, etc.

CR3 non pris en charge par Windows
Les fichiers RAW récents (ici un CR3 de Canon EOS R5) nécessitent une mise à jour logicielle pour être reconnus.

Mais il n’existe pas qu’un format RAW. Chaque constructeur possède le sien, qu’il modifie selon ses besoins et les nouvelles fonctions. Cela oblige les éditeurs de logiciels à développer de nouveaux outils à chaque nouvel appareil. Pour l’utilisateur, cela signifie d’une part qu’une ancienne version de son éditeur favori ne gère pas les boîtiers récents, et d’autre part que, en achetant le tout dernier modèle, il risque d’attendre une mise à jour avant de pouvoir développer ses photos.

C’est à cet éparpillement qu’Adobe a voulu mettre fin en proposant le format « digital negative » (abrégé en DNG). Comme les autres formats RAW, il permet de stocker les données brutes issues d’un capteur. Mais, contrairement à eux, ses spécifications sont publiques, permettant à tout logiciel compatible d’accéder aux informations qu’il contient.

Comment utiliser des DNG ?

Le DNG est donc un RAW « universel », utilisable pour stocker les données de tout type d’appareil photo. Comme tous les RAW, il ne s’agit pas d’un format d’image : c’est un « négatif numérique », qui contient les données sorties du capteur. Il s’utilise donc comme tous les autres fichiers RAW. Un logiciel de développement est indispensable : Lightroom ou Camera Raw chez Adobe, Capture One, DxO Photolab, ou encore Darktable ou RawTherapee, le choix est large. S’il impose le même flux de travail, le DNG offre tout de même deux avantages.

Développement d'un fichier DNG sous Darktable
Un DNG doit être développé dans un logiciel RAW, mais ne nécessite pas une mise à jour à chaque nouvel appareil.

D’une part, les appareils qui enregistrent au format DNG sont directement supportés par les logiciels compatibles. C’est le cas de Leica, Ricoh, Pentax et d’autres, et de nombreux smartphones. Si vous venez de vous offrir le tout dernier M11, inutile d’attendre son ajout dans votre logiciel : prenez ses fichiers DNG, importez-les dans votre éditeur, et voilà ! Peut-être certaines optimisations spécifiques pour ce modèle manqueront-elles, mais vous pourrez développer immédiatement vos images en profitant de toutes les possibilités du capteur.

D’autre part, les spécifications du DNG étant publiques, il n’y a pas d’inquiétude à avoir sur la pérennité du format. Imaginons que vous souhaitiez développer dans vingt ans une image capturée aujourd’hui. D’ici là, peut-être le constructeur de l’appareil photo aura-t-il disparu. Peut-être les logiciels capables d’ouvrir ses fichiers RAW n’auront-ils pas été portés vers les derniers systèmes d’exploitation. Avec le DNG, même si Adobe devait faire faillite, il sera toujours possible de se baser sur les spécifications pour recréer un logiciel de lecture de A à Z !

Transformer des RAW classiques en DNG

Nous l’avons dit, certains fabricants utilisent directement le format DNG pour leurs données RAW. Mais ce n’est pas le cas de tous, et les fichiers CR3, ARW, NEF, RAF et consorts restent les seules options proposées par Canon, Sony, Nikon, Fujifilm et autres. Aussi, si votre logiciel habituel ne gère pas le format spécifique d’un appareil photo, vous pouvez essayer la conversion.

DNG Converter et ses options
DNG Converter et sa fenêtre d’options.

Adobe propose en effet un logiciel gratuit, Digital Negative Converter, capable de créer des fichiers DNG à partir des données contenues dans un fichier RAW propriétaire. Vous pouvez ainsi obtenir des duplicatas au format DNG, avec les mêmes données et donc les mêmes possibilités de post-traitement. La seule contrainte : DNG Converter doit connaître votre appareil. Si vous avez la toute dernière version des logiciels d’Adobe, ils gèrent nativement les mêmes modèles, ce qui rend DNG Converter inutile.

Mais si vous utilisez une version plus ancienne (Photoshop CS6 ou Lightroom 5 par exemple) ou un autre logiciel, DNG Converter vous permet de créer un fichier « universel ». Vous pourrez ainsi développer les photos d’appareils récents, non supportés dans votre application !

Développement d'une photo d'EOS R5 sous Darktable
Cette version de Darktable ne gérait pas les fichiers CR3. DNG Converter lui a tout de même permis d’ouvrir une image d’EOS R5 convertie en DNG.

Naturellement, la rétrocompatibilité peut imposer certains sacrifices. Par exemple, si vous créez un fichier DNG compatible avec Lightroom 2, vous perdrez les informations relatives au Pixel Shift. En effet, Adobe ne le gérait pas à l’époque. Pour limiter ces pertes, choisissez toujours la version de DNG la plus récente que supporte votre logiciel.

Un RAW sans matrice ?

Dernière option, plus inattendue : l’option « Linéaire (sans mosaïque »). Elle produit des DNG dématricés. Il ne s’agit plus alors de véritables fichiers RAW, mais cela a l’énorme avantage de disposer de données presque brutes, utilisables par les logiciels habituels, même avec des capteurs originaux.

Vous ne pourrez naturellement plus modifier les paramètres du dématriçage. Mais les autres fonctions profitent toujours des possibilités du capteur — et notamment sa plage dynamique complète. Vous pouvez refaire à volonté la balance des blancs, les réglages de tonalité et de colorimétrie, etc. C’est donc une possibilité intéressante si, par exemple, vous avez brièvement utilisé un Fujifilm X-Trans et souhaitez développer ses fichiers dans votre logiciel habituel, prévu pour les matrices de Bayer…

Capteur à matrice de Bayer vs capteur Fujifilm X-trans
Les capteurs X-Trans (à droite) ne sont pas gérés par certains logiciels, qui attendent une matrice de Bayer (à gauche). Un DNG dématricé peut permettre de traiter leurs images.

Notez que si votre logiciel gère le type de capteur souhaité, cette fonction est inutile. En effet, le format DNG peut enregistrer des fichiers bruts utilisant n’importe quelle matrice, ou même aucune matrice (comme les Leica Monochrom). Si votre éditeur peut créer une image à partir de données X-Trans, monochromes ou autres, vous avez donc tout intérêt à faire un DNG normal. Il pèse moins lourd et vous pourrez modifier les paramètres de dématriçage.

Faut-il passer au DNG ?

Reste la question classique : devez-vous convertir tous vos RAW propriétaires en DNG ? Vous seul pouvez y répondre. Lancer l’opération et gérer les fichiers existants prend du temps, et l’avantage n’est pas nécessairement évident. Sur le disque dur, selon les options retenues, un DNG peut être un peu plus léger, mais aussi beaucoup plus lourd.

Quant à la crainte de ne plus pouvoir développer ses fichiers, elle s’avère pour l’heure infondée. Le cas de Minolta est à ce titre intéressant. Le logiciel qui accompagnait les Dimage et Dynax ne fonctionne pas sous Windows 10, mais les outils actuels ouvrent toujours sans hésiter leurs fichiers MRW. Ce danger est donc théorique plutôt que pratique. Surveillez tout de même le support de vos plus anciens appareils lorsque vous changez d’ordinateur ou de système d’exploitation. Il est alors temps de convertir les fichiers qui ne fonctionneraient pas avec votre nouvel équipement.

Si, en revanche, votre appareil photo vous donne le choix du DNG, n’hésitez pas à l’activer ! Vous serez ainsi sûr de profiter des avantages de ce format, sans renoncer aux possibilités les plus avancées de votre matériel.

Avatar de Franck Mée
Auteur

Traducteur, journaliste, pilote privé. Passionné de photo et de cinéma, docteur en binge-watching, mais surtout fasciné par tout ce qui vole, du martinet au Boeing 747. Considère qu'un 200 mm, c'est un grand-angle.

2 Commentaires

  1. Avatar de Franck Mée

    Bonjour,
    Ce qui est déroutant dans le format DNG, c’est que lors d’export à partir de logiciel de PT, on peut y mettre n’importe quel autre format, JPEG, tiff ou autres et dans ce cas on ne sait jamais de quoi est composé le fichier et la les avantages du fichier RAW sont totalement perdus . Qu’en pensez vous ?

    • Avatar de Franck Mée
      Franck Mée Répondre

      Bonjour,
      en effet, certains logiciels (notamment Lightroom) permettent d’exporter un fichier au format DNG. Dans ce cas, la composition exacte du fichier dépend des options sélectionnées, comme dans DNG Converter.

      De manière générale (sauf réglages spécifiques), un export DNG va donner soit une conversion du raw d’origine, soit un DNG dématricé mais conservant les données linéaires et la profondeur de couleurs d’origine, comme évoqué dans le paragraphe « Un raw sans matrice ? ».
      Un aperçu JPEG ou TIFF est effectivement intégré, mais il est là essentiellement pour obtenir un aperçu dans le gestionnaire de fichiers. Cependant, les données brutes restent présentes et il reste possible de modifier les paramètres de développement (sauf éventuellement le dématriçage) avec toute la souplesse du raw. Ceci étant, les logiciels Adobe proposent également une compression avec pertes, qui permet de gagner de l’espace disque tout en gardant la profondeur de couleurs d’origine : la qualité est légèrement moins bonne, mais le fichier reste beaucoup plus librement éditable qu’un JPEG ou un TIFF.
      Notez que le DNG permet d’encapsuler autant de fichiers qu’on le souhaite : il est par exemple possible d’enregistrer dans le même fichier un aperçu JPEG haute qualité, des données DNG dématricées et le raw d’origine. Le fichier est alors énorme, mais chaque logiciel ira chercher la partie qui lui convient (par exemple, un éditeur d’image pourra utiliser les données DNG ou le raw d’origine selon qu’il gère ou non l’appareil photo concerné, tandis que l’explorateur de fichiers se contentera d’afficher rapidement le JPEG).

      De manière générale, l’export DNG est donc plutôt utile pour les techniciens qui ont une utilisation précise en tête. Pour un simple utilisateur, nous conseillons trois méthodes de base :
      — mon logiciel gère les raw de l’appareil et je suis d’un naturel serein : utiliser les raw pour le développement et le stockage, et exporter en JPEG ou en TIFF pour l’affichage, le partage ou l’impression ;
      — mon logiciel gère mon appareil, mais je suis inquiet et je veux un format standard pérenne : convertir les raw en DNG pour le développement et le stockage ;
      — mon logiciel ne gère pas mon appareil : convertir en DNG (et si mon logiciel ne gère pas la structure de capteur de mon appareil, convertir en DNG dématricé) pour le développement et le stockage.

      Merci de votre attention !

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