Beauté glaciale. Beauté glaçante… Les photos de Daria Endresen racontent un monde au-delà du nôtre, où mystères et rites sacrés côtoient l’étrange et l’obscurité. Un univers à la fois cauchemardesque, déroutant… et fascinant. 

© Daria Endresen

Que l’on soit réceptif ou non à l’atmosphère quasi oppressante qu’il s’en dégage, il est dans tous les cas bien difficile de rester insensible aux compositions de la demoiselle. Les corps y sont androgynes, souvent dimorphes. La chair est comme une surface lisse que l’on peut déformer à loisir… Sans douleur, sans contrainte, semblant défier les lois du temps et de l’espace, flottant dans un entre-deux paisible mais insondable. 

Ainsi, Daria Endresen a participé à de nombreuses expositions à travers le monde : aux États-Unis, dans de nombreux pays d’Europe ou encore en Turquie. D’ailleurs, il y a quelques années, à Paris, ses œuvres étaient exposées aux côtés de celles d’un certain David Lynch…

© Daria Endresen

DIAMANT NOIR

Daria Endresen est née en Norvège, et cela se voit. « J’ai toujours ressenti un lien fort, un incroyable sentiment d’appartenance à cette terre. Et je pense que cela se reflète dans mon univers visuel. D’ailleurs, c’est la photographie de paysage qui m’a attiré en premier lieu. Lorsque vous vivez en Norvège, c’est presque un péché de ne pas essayer ! » Un pays dominé par la Nature. Une terre sauvage, territoire de légendes, berceau de la mythologie viking, lieu de superstitions et de rites ancestraux. « C’est aussi ce côté sombre des pays nordiques que je tente de décrire dans mes images, en jouant avec les éléments de climats rigoureux, l’absence de lumière, l’éloignement… Avec cette nature généralement préservée de la population. » 

© Daria Endresen

Ainsi, à travers ses photos-tableaux, Daria Endresen aborde des thèmes aussi variés que la solitude, la religion, la féminité, la souffrance, l’identité ou le désespoir. Le tout porté par une mélancolie intrinsèque, cauchemardesque et pourtant étrangement sereine.

DANCER IN THE DARK 

Sa passion pour la photographie, Daria Endresen la tient de son père. C’est d’ailleurs lui qui lui offrira son premier Reflex, après qu’elle a passé des heures à l’observer sur le terrain ou dans sa chambre noire, à développer ses images. Et si la jeune fille est d’emblée inspirée par les (magnifiques) paysages de son pays, elle est également largement influencée par les livres d’art qui garnissent la bibliothèque de ses parents. Elle y découvre nombre de chefs d’oeuvre, qui plus tard, auront un impact direct sur son travail. C’est notamment le cas de la toile d’Hans Memling, Le Jugement dernier : « ses démons me terrifient et me captivent à la fois » se plaît-elle à répéter. On pourrait facilement ajouter que la phrase sied également à ses propres compositions… 

© Daria Endresen

« À chaque fois que je suis dans la nature, je ressens cet incroyable sentiment d’appartenance. Il est si facile de s’inspirer de tout ce que je vois autour de moi, que ce soit de hautes montagnes couvertes de neige, des fjords d’un bleu profond ou des bois dans le brouillard. Je me considère chanceuse d’en faire partie et de pouvoir exprimer mon affection pour elle dans mes créations personnelles. »

Quand elle n’utilise pas les panoramas glacés de son pays en toile de fond, Endresen fixe ses silhouettes en studio, tout en continuant de « puiser son inspiration dans ses histoires les plus intimes et personnelles ». Les corps sont imberbes, souvent nus et pourtant asexués… Comme venus d’une autre planète. Une terre où règnerait une sorte de chaos silencieux. Ils sont objets d’expérimentation et de sacrifices, outils de cérémonies et autres rituels sauvages, souvent malmenés – mais toujours furieusement calmes, presque apaisés. La peau des modèles est pâle, exposée. « Je trouve que la nudité est simple et qu’elle me procure un certain sentiment d’ouverture et de vulnérabilité. Je pense aussi que le corps humain est beau. J’avoue, j’ai énormément de respect et d’admiration pour les modèles qui acceptent de travailler avec moi. J’oserais à peine poser pour quelqu’un comme moi ! »

© Daria Endresen
© Daria Endresen

OMBRE EST LUMIÈRE

« J’ai commencé avec un Canon EOS 20D, puis il y a quelques années, je suis passé à l’EOS 5DM2. Je n’ai pas un très grand nombre d’objectifs – celui que j’utilise le plus à l’heure actuelle est le 50 mm 1,4. Le trépied et la télécommande sont également utiles. J’ai aussi quelques éclairages de studio mais je les utilise très rarement. » Son travail de la lumière n’est pas sans rappeler celui des peintures flamandes : ce mélange de douceur et de poésie, qui pourtant, met parfois mal à l’aise celui qui regarde le résultat final. 

© Daria Endresen

Autre élément primordial dans le travail de Daria Endresen : la post-production. Elle admet volontiers être une grande adepte de la retouche. Car selon elle, les effets numériques « améliorent » et non « manipulent » la réalité. « Je ne suis pas documentariste. Il n’y a pas de règles ou de limites autres que celles de ma propre imagination. » Elle passe ainsi de nombreuses heures derrière son écran à retoucher en détail les images brutes de ses shootings. 

Au final, les photos de Daria Endresen sont un voyage. Un voyage personnel, temporel, psychique, physique, quasi métaphysique. Et sans aucun doute, d’une intensité rare.

© Daria Endresen
© Daria Endresen
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En savoir plus sur Daria Endresen : 

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Auteur

Journaliste, Curieuse, Baroudeuse, Couteau Suisse. Passionnée par le cinéma, la littérature, la photographie et la contre-culture. Bref, lire, écrire et courir, mais pas les trois à la fois parce que ce n'est pas pratique.

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