Faisant suite à notre article dédié sur le format RAW, nous allons voir maintenant quelle configuration matérielle est nécessaire pour pouvoir lire des fichiers RAW nativement. Nous ne parlerons donc pas de la gestion des fichiers via des fichiers proxy, mais bel est bien des fichiers natifs. Nous allons lister point par point toutes les parties matérielles nécessaires (processeur, carte graphique, mémoire vive et stockage) afin d’avoir la station la plus optimisée.
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Le Processeur “CPU”

Lire un fichier RAW demande à votre système de décoder (débayerisation) la matrice pour afficher une image. Cette tâche est historiquement attribuée au processeur, le CPU. Il existe même des coprocesseurs dédiés pour le décodage de codecs spécifiques comme pour le H264, par exemple.
Selon des tests réalisés par le site de l’assembleur pugetsystems.com, il est intéressant de remarquer que pour décoder des fichiers RED RAW, il faudra privilégier des processeurs avec un grand nombre de cœurs pour de meilleurs résultats. Ainsi, les processeurs disposant de 32 cœurs chez le constructeur AMD permettent une lecture à 24 images/seconde de fichiers 6K en RED RAW dans Adobe Premiere Pro.
Mais cette règle du nombre de cœurs ne s’applique pas à tous les fichiers RAW. En effet, pour les séquences d’images type DNG, il faudra plutôt privilégier des processeurs avec des fréquences plus élevées pour avoir de meilleurs résultats. Comme le démontre le graphique ci-dessous.
Pour l’Apple ProRes RAW, Apple n’a pas communiqué sur les configurations dites “conseillées”. Mais selon les tableaux comparatifs avec les fichiers RED disponibles sur le “Papier Blanc” d’Apple, on peut voir dans les légendes des configurations ayant des processeurs Xeon d’Intel à 18 cœurs. Nous pouvons donc supposer que pour l’Apple ProRes RAW le nombre de cœurs peut être important.
Pour le Blackmagic RAW, la problématique est différente, car les fichiers Blackmagic RAW sont en partis décodés lors de l’enregistrement et demandent donc moins de ressources au processeur.
La Carte Graphique “GPU”

Alors que le CPU peut prendre en charge tout type de calcul, le GPU est dédié aux calculs liés à l’affichage des images sur votre moniteur. Ces dernières années, le constructeur NVIDIA a développé de nombreuses instructions dédiées “Cuda” sur ces processeurs graphiques afin d’accélérer les effets, la lecture de fichiers et le calcul d’images 3D.
En 2018, en collaboration avec RED, NVIDIA a annoncé être capable de lire des fichiers RED RAW 8K à 24 images/secondes via son application RED CINE X PRO. Ceci est possible grâce aux dernières cartes graphiques Titan 2080 RTX et leur architecture “TURING”. Tous les éditeurs de logiciels de montage peuvent intégrer cette accélération au sein de leur logiciel de montage.
Que ce soit Apple avec Final Cut Pro X qui poussent les accélérations GPU avec METAL2 ou bien Blackmagic Design avec DaVinci Resolve qui permet de cumuler la puissance de plusieurs cartes, les logiciels de montage utilisent de plus en plus les accélérations des cartes graphiques. L’objectif est de réaliser une lecture en temps réel des vidéos et de réaliser des effets associés (étalonnage, transitions, effets). Le choix d’une carte graphique puissante est donc très important pour votre station de montage et ce, surtout pour la lecture des fichiers RAW.
La Mémoire vive “RAM”

La mémoire vive ou “RAM” permet à votre ordinateur de garder et de traiter des informations très rapidement. Par exemple, lorsque vous ouvrez une image, celle-ci se charge dans la mémoire vive, ainsi vous pouvez la manipuler facilement. Dans le cas où l’image est très grande et très lourde, si son poids dépasse votre mémoire vive, alors elle devra se charger par morceaux ce qui entraîne donc une perte de rapidité et de fluidité.
Pour la vidéo c’est un peu la même chose, si le fichier est plus lourd, ce qui peut être facilement le cas avec les fichiers RAW, la lecture en temps réel ne pourra se faire même si vous avez un bon CPU et GPU. Donc, le conseil pour travailler avec des fichiers RAW est d’avoir au minimum 32Go de mémoire vive, et plus serait encore mieux. Dans les nombreux tests des constructeurs et des éditeurs, les stations de montage bénéficient de 128Go de RAM en général.
Le Stockage

Un autre point essentiel pour le montage des fichiers RAW, et pour le montage tout court, c’est le stockage. Il faut un stockage rapide (haut débit/bande passante) et sécurisé afin de protéger vos projets. Concernant l’espace disque nécessaire, cela varie en fonction des fichiers RAW avec lesquels vous travaillez.
En effet, par définition un fichier RAW contient toutes les informations de couleurs et de luminance de votre image. Aucune compression n’est appliquée. Cela a pour conséquence de générer des fichiers très lourds. Par exemple, chez le constructeur Arri, un site web a été mis en place afin de connaître le poids des fichiers, mais aussi la bande passante nécessaire pour la lecture en temps réel.
Dans l’exemple ci-dessous, si nous choisissons une caméra Arri 65 pour le cinéma, avec une définition de 6560×3100 pixels. Pour une heure de tournage, il faut un stockage de 2,6To et une bande passante d’environ 5 Go par seconde. Il vous faudra donc une baie de disques digne des grands studios hollywoodiens !

Mais, je vous rassure, vous pouvez travailler des solutions plus accessibles en termes de poids et débits. En effet, par exemple le RED RAW est un format compressé. Cela peut être contradictoire… En fait, la compression ne s’applique pas aux informations de couleurs et de luminance, mais uniquement sur le fichier numérique lui-même. RED a d’ailleurs déposé des brevets sur cette compression des fichiers RAW sans perte et Apple a enclenché une procédure juridique.
On peut donc voir en fonction du rapport de compression que les formats REDCODE RAW demandent moins de bande passante et de stockage. Avec la plus forte compression de 22:1, on est autour des 200 Go par heure pour du 8K à 24 images par seconde.

Les formats RAW comme l’Apple ProRes RAW ou le Blackmagic RAW ont des rapports poid/débit plus ou moins équivalents au Redcode (5:1), mais ayant un décodage plus simple à réaliser, ils peuvent être lus plus facilement.
Pour résumer
Monter nativement des fichiers RAW demande une configuration très haut de gamme avec de bons processeurs, de bonnes cartes graphiques et de gros stockages. Le montage RAW natif est principalement réservé pour les projets courts (clips musicaux, publicités). Pour les projets longs, on passera par des étapes de transcodage et l’utilisation des proxys.
L’arrivée des formats RAW comme le ProRes RAW ou Blackmagic RAW permettent de soulager les configurations, mais il faut encore des stations haut de gamme pour traiter ce type de fichiers. L’évolution rapide des cartes graphiques et le développement des stockages rapides (Thunderbolt 3, SSD) vont permettre dans un futur proche d’utiliser les fichiers RAW aussi facilement que pour la photographie.
2 Commentaires
Salut Lucien,
Pour un GH5S, il faudrait combien de Tera pour environ 25heure de rush? Et quelle serait la meilleure carte mémoire ?
Je te remercie.
Jis
Bonjour, les paramètres d’enregistrement sont nombreux sur le Lumix GH5s. Ils possèdent tous différents débits, qui impacteront forcément le poids final des fichiers.
Par exemple, pour un réglage d’enregistrement au format UHD 100 Mbit/s (4:2:0 8 bits LongGOP), le raisonnement sera le suivant :
– On convertit 100 mbps en Mo/s en le divisant par 8 -> 100/8= 12.5 Mo/s
– 12.5 Mo par seconde correspondent donc à 45Go par heure -> (12.5 x 60) x 60 = 45 000 Mo/h
– Ensuite, il suffit simplement de multiplier par le nombre d’heures prévues -> 45 x 25h = 1125 Go soit 1.125 To.
Vous pouvez reprendre cet exemple et l’adapter au débit que vous souhaitez sélectionner.
Concernant les cartes mémoires, le fabricant recommande l’utilisation de cartes normées V90. Cependant, si vous ne comptez pas utiliser d’enregistrement supérieur à 150 Mbit/s, vous pouvez sans problème utiliser des cartes normées V30 de marque Sandisk ou Sony par exemple.